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RENOUVELLEMENT DE BAIL ET DEPLAFONNEMENT

Dernière mise à jour : 31 août 2023

Les droits méconnus des Bailleurs et Preneurs


Quelle est la valeur locative en renouvellement d’un local commercial ? Qu’est ce que le loyer plafond et comment se calcule-t-il ? Quelles sont les conditions de plafonnement ou de déplafonnement du loyer en cours ? Quel est l’impact de la Loi Pinel dans le renouvellement du bail commercial ?

Renouvellement de bail

SOMMAIRE


Qu’elle est la valeur locative de renouvellement ?

La règle du plafonnement et le loyer plafond

Les conditions d’application du déplafonnement

Les correctifs judiciaires de la valeur locative de marché


Nombreux sont les contentieux lors de la fixation du loyer en renouvellement de bail commercial entre le Propriétaire – Bailleur et le Locataire – Preneur. En effet, la plupart du temps, le Bailleur est à l’initiative du différend puisqu’il sollicitera une augmentation du loyer en cours lors du renouvellement, que le Preneur se réservera le droit de contester. Si les majorations de 5 / 15% du loyer en cours se résolvent régulièrement à l’amiable, au-delà, les affaires sont quasi systématiquement portées devant le Juge des Loyers.


Une bonne connaissance de la pratique et du statut des baux commerciaux est indispensable dans le cadre de la fixation du loyer et de la valeur locative de renouvellement, et dès lors de la résolution des litiges entre Bailleurs – Preneurs. La jurisprudence est abondante en la matière et l’appui d’un avocat spécialisé et d’un expert immobilier est vivement recommandé dans le cas des baux commerciaux dérogeant pour certains articles au Code de commerce.



QU’ELLE EST LA VALEUR LOCATIVE DE RENOUVELLEMENT ?


La valeur locative de renouvellement se distingue de la valeur locative de marché en ce sens qu'elle est dépendante des clauses et conditions contractuelles prévues dans le bail commercial signé entre les parties. La valeur locative de marché peut s’apprécier librement par la comparaison du local libre aux autres commerces du secteur (voir nos étude de marché spécialisée : Rue St Honoré Paris / Rue de la République Lyon / données générales Paris...)


En effet, lorsqu’un locataire prend à bail un local commercial, le loyer est fixé à la valeur locative de marché, qui « correspond au montant pour lequel un bien pourrait être raisonnablement loué. Elle s’analyse comme la contrepartie financière annuelle de l’usage d’un bien immobilier dans le cadre d’un contrat de bail. » (Charte de l’Expertise en Evaluation Immobilière, 5ème édition, 03/2017).


A l’inverse, lors que l’une des deux parties sollicitent le renouvellement de bail (généralement par voie d’huissier pour fixer la demande et la date d’effet du bail renouvelé), le loyer en cours doit être fixé à la valeur locative de renouvellement. Définie dans le Code de commerce, elle est légèrement différente de celle du marché en raison des critères des articles L145-33 et R145-3.


L’article L. 145-33 stipule que « le montant des loyers des baux à renouveler ou à réviser doit correspondre à la valeur locative. A défaut d’accord entre les parties, cette valeur est déterminée d’après les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité, les prix couramment pratiqués dans le voisinage. »


Dès lors, la valeur locative de renouvellement peut sommairement s’apparenter à la valeur locative de marché, toutefois corrigée des conditions du bail commercial et de l’activité du Preneur. Suivant les clauses prévues au bail (en faveur du Bailleur ou du Preneur), diverses majorations ou abattements de la valeur peuvent être retenues, du moins sur le plan judiciaire.



LA REGLE DU PLAFONNEMENT ET LE LOYER PLAFOND


Bien souvent méconnu des Locataires – Preneurs, le statut des baux commerciaux confère au locataire une protection certaine quant au montant du loyer des baux renouvelés. Le loyer plafond est institué par l’article L. 145-34 du Code de commerce, qui ne peut être dérogé que dans certaines conditions.


Ainsi, dans plus de 80% des demandes de renouvellement et contentieux, le Bailleur sollicite déplafonnement de l’évolution de loyer sans conditions, ainsi qu’un renouvellement de bail à la valeur locative de marché ou sensiblement supérieure au dernier loyer révisé, en omettant la règle du plafonnement.


Dans la théorie (hors conditions de déplafonnement que nous exposerons ci-après), la valeur locative de renouvellement doit donc correspondre au loyer plafond. Ce dernier se calcule à partir du loyer initial / de base prévu au bail, révisé suivant l’évolution de l’indice ILC ou ILAT (selon l’activité du Preneur), et ce de manière rétroactive à la date d’effet du dernier bail échu. En effet, suite à la Loi Pinel, quand bien même le bail prévoyait une clause d’échelle mobile et d’indexation annuelle du loyer suivant l’indice ICC, le Juge des loyers retiendra l’indice ILC ou ILAT dans la détermination du loyer plafonds.


Exemple de calcul du loyer plafonds et de la règle du plafonnement :


  • Bail commercial de 3, 6, 9 ans à effet du 1er janvier 2010, pour un loyer de 43.200 €/An Ht-Hc ;

  • Clause d’échelle mobile prévue au bail suivant l’ICC (indice de base fixé au T3 2009 : 1502) ;

  • Dernier loyer « théorique révisé » au 1er janvier 2018 :

43.200 € x 1670 (ICC T3 2017) / 1502 (ICC T3 2009) = 48.031,96 €/An Ht-Hc ;

  • Demande en renouvellement sollicité par le Bailleur le 1er septembre 2018 à effet du 1er janvier 2019 (au terme des 9 ans du bail) pour 60.000 €/An Ht-Hc.


Dans le cadre du renouvellement de bail, le Locataire – Preneur peut accepter le principe de renouvellement mais contester le nouveau loyer de 60.000 €/An Ht-Hc proposé par le Propriétaire – Bailleur, si ce dernier ne justifie d’aucun motif de déplafonnement de la valeur locative (cf. règle du déplafonnement ci-après). Il est donc en droit de demander la fixation de la valeur locative de renouvellement au loyer plafond, comme calculé ci-après :


  • Loi Pinel : remplacement de l’indice ICC par l’indice ILC ;

  • Préavis : congé avec offre de renouvellement devant respecter un préavis de 6 mois avant l’échéance du bail, soit une demande en date du 1er septembre 2018 correspondant à une date d’effet au plus tôt au 1er mars 2019, reportée au prochain trimestre civil au 1er avril 2019 ;

  • Choix des indices : l’indice initial ICC T3 2009 est remplacé par l’ILC T3 2009 (101,21) et le dernier indice correspond à l’ICL T4 2018 (114,06) en raison d’un bail échu de 9 ans et 1 trimestre supplémentaire (T3 2018 + 1 trimestre).

calcul loyer plafond

La valeur locative de renouvellement serait donc dans ce cas précis de 48.685 €/An Ht-Hc et non de 60.000 €/An Ht-Hc.


A noter que le Propriétaire – Bailleur prend un risque en sollicitant le déplafonnement de l’évolution du loyer en cours, sans le justifier, puisque ce dernier aurait pu à l’amiable, obtenir le renouvellement de bail au dernier loyer indexé au 1er janvier 2019 suivant l’ICC T3 2018 (1733), soit 43.200 € x 1733 (ICC T3 2018) / 1502 (ICC T3 2009) = 49.843,94 €/An Ht-Hc et une perte de 1.160 €/An de loyer.



LES CONDITIONS D’APPLICATION DU DEPLAFONNEMENT


La législation actuelle prévoit plusieurs conditions d’application du déplafonnement de l’évolution du loyer, et notamment lorsque :

  • il existe une modification notable des éléments de la valeur locative mentionnés dans l’article L. 145-33 (hors celui des prix pratiqués dans le voisinage) :

    • Modification des caractéristiques du local considéré (article R. 145-3 et 4) ;

    • Modification de la destination des lieux (article R. 145-5) ;

    • Modification des facteurs locaux de commercialité (article R. 145-6) ;

    • Modification des obligations respectives entre les parties (article R. 145-8) ;

  • la durée contractuelle du bail est supérieure à 9 ans ;

  • la durée effective du bail expiré est supérieure à 12 ans ;

  • la valeur locative de marché est inférieure au loyer plafond ;

  • le loyer indexé est supérieur à 25% du loyer initial/de base (article L. 145-39).


Uniquement dans les différents cas exposés ci-dessus et si le Propriétaire – Bailleur est en mesure de le justifier, la valeur locative de renouvellement peut être fixée à la valeur locative de marché, corrigée des clauses et conditions spécifiques prévues au bail (cf. infra : les correctifs judiciaires).


La valeur locative de marché est usuellement appréciée par une méthode dite par comparaison, consistant « à partir directement des références de transactions effectuées sur le marché immobilier pour des biens présentant des caractéristiques et une localisation comparable à celle du produit expertisé. Cette approche est utilisée tant pour déterminer la valeur vénale que la valeur locative de marché d’un actif immobilier. On les appelle également parfois des méthodes par le marché ou encore par comparaison directe. » (Charte de l’Expertise en Evaluation Immobilière, 5ème édition, 03/2017).



Cas des locaux monovalents : la jurisprudence définie les locaux monovalents comme locaux construits en vue d’une seule utilisation de par ses aménagements, de sorte qu’il faudrait exécuter de lourds travaux de restructuration pour les affecter à un autre usage (ex : cinemas, hôtels...). La Cour d’Appel de Paris précise qu’il doit s’agir d’aménagements lourds de gros œuvre sur les volumes, la distribution et les aménagements internes. De jurisprudence constante, sont réputés monovalents par construction ou par aménagement les hôtels, garages automobiles, cinémas, théâtres, salles de spectacle et établissements de santé.


Par dérogation aux dispositions relatives à la fixation du prix du loyer renouvelé dans le Code de commerce, l’appréciation du loyer renouvelé des locaux monovalents est réalisée à partir des usages observés dans la branche d’activité considérée (Art. R. 145-10 du Code de commerce) et le loyer de renouvellement échappe au mécanisme de plafonnement du loyer prévu par le statut des baux commerciaux.



Cas des locaux « à usage exclusif de bureaux » : La jurisprudence précise que « l’usage exclusif de bureaux » n’est pas incompatible avec le fait pour le Preneur d’y recevoir de la clientèle et des fournisseurs, dès lors que ce local ne sert notamment ni au dépôt ni à la livraison de marchandises. Les agences bancaires, de voyages, immobilières, d’assurances sont à ce titre considérés comme des locaux à usage exclusif de bureaux, leurs activités étant essentiellement d’ordre comptables, administratives et juridiques, non affectées par la réception de clientèle (jurisprudence constante de la Cour de Cassation).


Par exception et suivant l’article R. 145-11 du Code de commerce, la règle du plafonnement est écartée pour les locaux dits « à usage exclusif de bureaux ». Toutefois, il convient de préciser que dans cette hypothèse, la valeur locative de marché doit correspondre à celle des bureaux et non des commerces / boutiques traditionnelles !


A rappeler que dans le cadre d’un contentieux judiciaire, la décision d’application du déplafonnement de l’évolution du loyer reste à l’appréciation souveraine du Juge. Aussi, la Loi Pinel a institué un plafonnement du loyer déplafonné à 10%/An du dernier loyer pratiqué (pour les baux usuels).



LES CORRECTIFS JUDICIAIRES DE LA VALEUR LOCATIVE DE MARCHE


Le juge des loyers sera susceptible de retenir différents correctifs (majorations ou abattements) à appliquer sur la valeur locative de marché, pour ainsi fixer la valeur locative de renouvellement déplafonnée. Ainsi la jurisprudence a pu retenir :


- Les majorations suivantes, au titre :

  • Du droit de jouissance de surfaces autres que celles prévues au bail (terrasses, étalage extérieur sur le domaine public, cour privative, jardin …) ;

  • Du droit de modification des caractéristiques du local (édification d’une mezzanine, percement d’un mur porteur pour communication avec des locaux adjacents …) ;

  • D’avantages inhabituels au profit du locataire (location-gérance, droit de préférence des murs, cession libre du droit au bail, destination étendue à plusieurs activités ou tous commerces, faculté de résiliation du bail sous certaines conditions …) ;

  • Des caractéristiques immobilières des locaux (surface réduite de moins de 20 m², façades ou décors exceptionnels, communication avec des locaux adjacents, liaison avec le 1er étage ou droit de jouissance d’un logement attaché à la boutique …).


- Les abattements suivants, au titre :

  • Des charges exorbitantes pesant sur le locataire (article 606, taxe foncière, assurance de l’immeuble, travaux de mise aux normes, réglementaires ou liés à la vétusté) ;

  • Des caractéristiques immobilières des locaux (absence de façade sur la voie publique, faible hauteur sous-plafond, absence de sanitaires … )

  • Des restrictions inhabituelles pesant sur l’exploitation du fonds (fermeture anticipée dans le cadre d’une activité de restauration / café / bar, droit de préemption du fonds par le Bailleur, renoncement au bénéfice du plafonnement et au lissage du déplafonnement, loyer binaire …) ;

  • De l’accession différée des travaux entrepris par le locataire (accession en fin de bail et non en fin de jouissance pour des locaux livrés bruts de béton avec fluides en attente).


D’une manière générale, ces correctifs sont compris entre 2 et 5% de la valeur locative de marché, jusqu’à 10% de nature exceptionnelle. Le bail étant couramment en faveur du Bailleur, il est courant d’observer sur le plan des contentieux judiciaires, une valeur locative de renouvellement déplafonnée corrigée à la baisse de 5 à 10% par rapport à la valeur locative de marché.


Ainsi, il vous est vivement conseillé de faire appel à un Expert Immobilier spécialisé, qui saura vous accompagner dans l’évaluation de la valeur locative de marché et / ou de renouvellement de votre local commercial ou tertiaire, au moyen d’une analyse complète de votre bail, d’études de marché détaillées et de comparables probants, avec une jurisprudence à l’appui des conclusions. Le cabinet B&E Partners saura vous accompagner dans cette mission.


Deux vidéos claires et concises ont été éditées par le cabinet afin de vous éclairer sur les valeurs retenues par le Juge des loyers en cas de contentieux :


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